André Wogenscky,
Architecte humaniste

André Wogenscky (1916-2004) signe après 1956 plusieurs édifices phares des Trente Glorieuses dont les CHUs insérés dans les sites hospitaliers Saint-Antoine et Necker à Paris, la Maison de la Culture de Grenoble et la Préfecture des Hauts-de-Seine à Nanterre.

Le militant du progrès collectif

Imprégné des valeurs humanistes plébiscitées à travers l’élan de modernité qui anime les décideurs et les acteurs de ces trois décennies, il travaille sur les différents champs où se manifeste alors le puissant désir d’évolution de la société française.

Un pionnier de l’art accessible à tous

Il s’associe à l’ambition de rendre la création culturelle accessible au plus grand nombre en concevant le centre socioculturel des Marquisats à Annecy et la Maison de la Culture de Grenoble et en projetant, à la demande d’André Malraux, le Musée du XXe siècle et les quatre écoles d’art à La Défense.
Il participe à l’insertion sociale des jeunes en réalisant les Maisons des jeunes et de la culture de Bures-sur-Yvette et de Besançon, et le foyer Clairvivre à Saint-Étienne.

Des secteurs d’intervention variés

Il renouvelle profondément les espaces de la production industrielle pour Oric à Boussay (lien vers son oeuvre), la Snecma à Corbeil-Essonnes et Permali à Maxéville ; ceux de l’Administration préfectorale à Nanterre ; ceux du travail tertiaire pour EDF (lien vers son oeuvre) à Charleville-Mézières ; ceux de la Santé avec les hôpitaux de Flers (lien vers son oeuvre), de l’Aigle, de Luçon (lien vers son oeuvre) et de Corbeil-Essonnes (lien vers son oeuvre). Il fait évoluer ceux de l’Éducation avec la cantine scolaire de Marçon (lien vers son oeuvre ; ceux des loisirs avec le Centre de vacances de La Garde-Freinet (lien vers son oeuvre) et même ceux des infrastructures de transport en réalisant la station Auber (lien vers son oeuvre) du RER à Paris.

L’architecture, acteur de l’évolution sociale

Il contribue surtout à la redéfinition de l’espace du logement social qu’il entend adapter au nouveau statut de la femme, à l’évolution des valeurs familiales et des principes éducatifs ainsi qu’à l’apparition des éléments du confort et des appareils électroménagers. Il édifie le grand ensemble de Thionville, des immeubles isolés à Angers, et Montpellier, des groupements d’immeubles à Firminy, Villeurbanne, Valence, Marseille, Lille ou Gentilly…, des maisons habitations individuelles à Saint-Brévin-l’Océan, Saulieu, et Saint-Forget…., un lotissement ouvrier à Saint-Macaire-en-Mauges et les Unités d’Habitation de Marseille, Nantes, Briey, Berlin et Firminy, toutes cinq cosignées avec Le Corbusier. Avec la Maison Expérimentale (MEX), il tente de résoudre la question de l’évolutivité de l’habitation familiale.

L’architecte international

Pendant plus de deux décennies, il est également l’un des représentants les plus actifs de la présence française dans les pays du Proche Orient. Ainsi, à Beyrouth il édifie le Ministère libanais de la Défense, la faculté des Sciences, l’hôtel Holiday Inn, le Saint-Charles City Center et le Centre El, un vaste complexe, résidentiel, tertiaire et hôtelier. Si ses grands projets pour des complexes de loisirs, des infrastructures sportives, culturelles ou militaires ne se réalisèrent pas, une commande privée lui permit d’achever sa carrière par l’édification de l’Université des Arts de Takarazuka au Japon.

Le théoricien praticien

Parallèlement, en professionnel pleinement concerné par son époque, il participe aux différents grands concours qui rythment l’actualité de l’architecture et le renouveau de la commande publique française dans les années 1970-1990 : siège du ministère de l’Éducation nationale à La Défense (1970), musée Beaubourg (1971), quartier Curial à Chambéry (1975), Cité judiciaire de Lyon (1981), Opéra Bastille (1989), Centre international des conférences de Paris (1989).

Un disciple de Le Corbusier

Une relation puissante au site, des volumes clairement structurés, des variations spatiales particulièrement accusées des espaces intérieurs, une réponse attentive à chacun des aspects de la vie quotidienne, un travail fin sur la texture des bétons et la couleur caractérisent notamment son œuvre dans laquelle se reconnaissent souvent le surcroît de tension procuré par les courbes et les formes ovoïdes de Marta Pan, son épouse.

À ses côtés, se trouvent également les noms de proches collaborateurs tels Henri Chauvet et Jacques Lavot puis Pierre Lagard, les confrères régulièrement associés tels Maurice Hindié, Louis Miquel et Alain Amadéo ou de jeunes professionnels tels Georges Maurios.

Un désir de transmission

Tout au long de sa carrière, il inscrit ses convictions dans le béton et les volumes qu’il dessine et construit. Il les fait également partager en donnant d’innombrables conférences et interviews, ou en rédigeant de multiples articles. Il a également signé un ouvrage de référence, « L’architecture active ». Enfin, il a participé des groupes de travail dont ceux des CIAM mais aussi à celui de la Création architecturale constitué à l’initiative de Max Querrien (directeur de l’Architecture au sein du ministère de la Culture que dirige André Malraux).

L’homme fidèle

Il achève sa vie professionnelle dans un triple hommage à celui qui l’a formé et a déterminé son avenir professionnel, Le Corbusier : il préside la fondation Le Corbusier de 1971 à 1982, transfère son agence (1973-1991) dans l’appartement-atelier de la rue Nungesser et Coli et publie en 1987 « Les Mains de Le Corbusier ». Il reste ainsi fidèle à cette figure tutélaire avec laquelle il a travaillé à la conception des plans d’urbanisme les plus retentissants de l’après-guerre (Saint-Dié, La Rochelle-La Palice, Meaux), à la mise au point du Modulor ou à la création de l’Atbat et avec lequel il a cosigné les cinq Unités d’Habitation réalisées en France et en Allemagne.

Le créateur reconnu

La contribution d’André Wogenscky a l’évolution de l’architecture en France et sa participation à son expansion internationale a été reconnue par l’attribution du Grand Prix national d’architecture en 1989.

Bibliographie

Ses réalisations ont fait l’objet des publications suivantes :

Monographies

  • Annick Peli-Audan (Cercle d’Art, 1993),
  • Paola Misino et Nicoletta Trasi (Le Moniteur, 2000)
  • Dominique Amouroux (Éditions du Patrimoine, Carnets d’architectes, 2011)

Études spécifiques :

  • Région des Pays de la Loire (revue 303, Arts, Recherches et Créations, n° 78, 2003, par Dominique Amouroux),
  • Préfecture des Hauts-de-Seine à Nanterre (Béatrice Ascoli-Hérold et Danielle Baron, Somogy 2006)
  • Ensemble socioculturel Les Marquisats à Annecy (D. Amouroux, CAUE 74, collection Portraits, 2014)
  • Siège de la Fondation à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Une Maison-Atelier, D. Amouroux, Jean-Michel Place, 2015).

Les relations entre son travail et celui de Marta Pan ont été analysées par François Barré (L’œuvre croisée, Cercle d’Art, 2007).

Biographie de Marta Pan